Un agent en CDI refusant de signer un nouveau contrat ne peut être radié pour abandon de poste
Public - Droit public général
22/11/2023
Un agent contractuel qui refuse de signer un nouveau CDI proposé par son employeur avant l’expiration d’un contrat en cours ne peut être radié des effectifs pour abandon de poste. Il en va de même lorsqu’il refuse un changement d'affectation qui s’apparente à une modification d'un élément substantiel de son contrat en cours. C’est ce qu’a déclaré le Conseil d’État dans une décision du 3 novembre 2023.
Deux ans plus tard, la commune lui a proposé de le recruter par un nouveau CDI au grade d’éducateur territorial des activités physiques et sportives, en qualité d’animateur et éducateur sportif.
L’agent a refusé de rejoindre cette affectation malgré trois mises en demeure, dont deux l’informant que faute pour lui d’y déférer, et sans justificatif, une procédure pour abandon de poste entraînant sa radiation des effectifs serait engagée à son encontre sans procédure disciplinaire préalable.
Le maire a ensuite prononcé la radiation des effectifs de l’agent pour abandon de son poste d’animateur éducateur sportif. Le tribunal administratif de Mayotte a annulé cet arrêté et enjoint à la commune la réintégration de l’agent dans ses effectifs en qualité de rédacteur territorial. La Cour administrative d’appel (CAA) de Bordeaux a annulé le jugement.
Dans une décision du 3 novembre 2023 (n° 461537, Lebon T.), le Conseil d’État a annulé l’arrêt d’appel. Après avoir rappelé dans quelles conditions une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste peut être engagée, il précise qu’il ne peut y avoir radiation pour abandon de poste lorsqu’un agent contractuel refuse de signer un nouveau contrat avec une nouvelle affectation ou refuse un changement substantiel de son contrat en cours.
Rappel par le Conseil d'État des conditions de l’abandon de poste :
« Une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié, qu'il appartient à l'administration de fixer. Une telle mise en demeure doit prendre la forme d'un document écrit, notifié à l'intéressé, l'informant du risque qu'il encourt d'une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable. Lorsque l'agent ne s'est pas présenté et n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé ».
Précisions apportées dans son arrêt du 3 novembre 2023 :
« Tel ne saurait cependant être le cas lorsqu'un agent contractuel, dont la situation est régie par les stipulations de son contrat, d'une part, refuse, avant l'expiration de ce contrat, de signer un nouveau contrat prévoyant une autre affectation ou d'accepter un changement d'affectation s'apparentant à la modification d'un élément substantiel de son contrat en cours, et, d'autre part, ne rejoint pas cette nouvelle affectation, une telle circonstance autorisant le cas échéant l'engagement à son encontre d'une procédure de licenciement, dans les conditions prévues par les articles 39-3 et 39-4 du décret du 15 février 1988 relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale, mais non l'engagement d'une procédure de radiation des effectifs pour abandon de poste ».
« Une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié, qu'il appartient à l'administration de fixer. Une telle mise en demeure doit prendre la forme d'un document écrit, notifié à l'intéressé, l'informant du risque qu'il encourt d'une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable. Lorsque l'agent ne s'est pas présenté et n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé ».
Précisions apportées dans son arrêt du 3 novembre 2023 :
« Tel ne saurait cependant être le cas lorsqu'un agent contractuel, dont la situation est régie par les stipulations de son contrat, d'une part, refuse, avant l'expiration de ce contrat, de signer un nouveau contrat prévoyant une autre affectation ou d'accepter un changement d'affectation s'apparentant à la modification d'un élément substantiel de son contrat en cours, et, d'autre part, ne rejoint pas cette nouvelle affectation, une telle circonstance autorisant le cas échéant l'engagement à son encontre d'une procédure de licenciement, dans les conditions prévues par les articles 39-3 et 39-4 du décret du 15 février 1988 relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale, mais non l'engagement d'une procédure de radiation des effectifs pour abandon de poste ».
La Haute juridiction annonce ainsi dans son arrêt que, lorsque l’agent ne rejoint pas la nouvelle affectation proposée, la procédure appropriée est celle du licenciement et non de la radiation des effectifs pour abandon de poste dans les hypothèses suivantes :
- refus de signer un nouveau contrat avec une nouvelle affectation avant l’expiration du premier contrat
- refus de modification d’un élément substantiel du contrat en cours
L’article 39-3 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 prévoit en effet la possibilité de licencier un agent contractuel recruté sur un emploi permanent notamment dans les cas suivants : « 1° La disparition du besoin ou la suppression de l'emploi qui a justifié le recrutement de l'agent ; / 2° La transformation du besoin ou de l'emploi qui a justifié le recrutement, lorsque l'adaptation de l'agent au nouveau besoin n'est pas possible ; / (…) 4° Le refus par l'agent d'une modification d'un élément substantiel du contrat proposée dans les conditions prévus à l'article 39-4 (…) ». C’est donc à cette procédure que doit recourir l’employeur public souhaitant modifier un élément substantiel du contrat ou proposer un nouveau contrat alors que le premier est en cours.
Dans cette affaire, le maire avait considéré que l’agent avait rompu le lien l’unissant au service en refusant de rejoindre son poste d’animateur éducateur sportif, justifiant une radiation des effectifs pour abandon de poste. La juges d’appel ont validé ce raisonnement. Toutefois, le Conseil d’État considère que la cour a commis une erreur de droit en statuant ainsi sans rechercher si l’agent avait « signé le nouveau contrat par lequel la commune proposait de le recruter en qualité d'animateur éducateur sportif ou si, à défaut de nouveau contrat, ce changement d'affectation constituait une modification d'un élément substantiel du contrat en cours, justifiant qu'il refuse de rejoindre cette nouvelle affectation ».
Dans une décision récente, le Conseil d’État avait également limité le recours à la procédure de radiation des cadres pour abandon de poste, en déclarant qu’elle ne pouvait s’appliquer au cas d’un fonctionnaire sans affectation (CE, 11 oct. 2023, n° 464419, Lebon T. ; voir Un fonctionnaire sans affectation ne peut pas être radié pour abandon de poste, Actualités du droit, 18 oct. 2023).
Source : Actualités du droit