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Payer son avocat en bitcoins, c’est possible !

Tech&droit - Blockchain
16/02/2018
Envolée des cours, initial coin offering (ICO), token, débat sur le statut particulier de ces actifs, régulation, etc. Les cryptomonnaies séduisent entrepreneurs et particuliers, mais également professionnels de la finance et du droit. L'analye d'Arnaud Touati, avocat associé, co-fondateur du cabinet Alto Avocats, et Mélodie Cabassu, stagiaire.
Les cryptomonnaies sont le sujet du moment. À côté des cryptoactifs "historiques" (les bitcoins et autres ethereums), se développent à grande vitesse d’autres actifs, les tokens, qui sont ces jetons émis lors d’une ICO.
 
De nombreux organismes sont prêts à facturer en monnaies virtuelles, mais alors qu’en est-il des cabinets d’avocats ?
 
Les avocats peuvent-ils se faire rémunérer en cryptoactifs ?
L’article 11.5 du Règlement intérieur national de la profession d’avocats (RIN) prévoit que « Les honoraires sont payés dans les conditions prévues par la loi et les règlements, notamment en espèces, par chèque, par virement, par billet à ordre et par carte bancaire ». Quid dès lors d’un versement en cryptomonnaies ?
 
Aucune disposition légale ou réglementaire n’interdit, en France, le paiement des avocats en cryptomonnaies. Ailleurs dans le monde, de plus en plus de cabinets recourent à ce nouveau service. Certains ont même médiatisé le recours à ce type de paiement, tels que Jay Cohan aux États-Unis, le cabinet Adam Atla au Québec, Susan Cosgrove en Irlande ou encore, récemment, Bruzzo Dubucq en France.
 
Les avocats partent du postulat que les startups qui font appel au crowdfunding ou aux levées de fond via une initial coin offering (ICO) ne disposent pas toujours de la liquidité nécessaire pour recourir aux services d’un avocat. Une barrière qui peut devenir un atout pour les professionnels du droit qui accepteraient ces nouveaux moyens de paiement.
 
Avantages et risques de ce type de rémunération
Le fonctionnement est alors le suivant : l’avocat convient avec son client que le paiement de sa prestation se fera en cryptomonnaie. Une convention d’honoraire est signée entre les parties, laquelle fige le montant de la prestation. La somme peut alors apparaître en euros et/ou en bitcoin (ex : 1,234 bitcoin). L’avocat pourra ensuite échanger sur une plateforme ces cryptoactifs ou se déplacer dans un espace d’échange pour effectuer un retrait en euros.
 
Ce moyen de règlement a de nombreux avantages pour les parties. Il assure une confidentialité certaine pour le client, réduit la complexité des transactions et permet un transfert rapide, certain et gratuit.
 
Pour autant, le paiement en bitcoin n’est pas sans risque. Les cryptomonnaies reposent sur la spéculation. Une fois la transaction effectuée, libre à l’avocat d’échanger ses bitcoins en euros ou de les accumuler et réaliser la transaction au moment qu’il estimera le plus opportun. Il pourra en tirer une plus-value ou supporter une éventuelle dévaluation. Or, le bitcoin fluctue énormément ces derniers mois, rendant sa valeur très incertaine.
 
Enfin, les avocats doivent faire preuve d’une vigilance renforcée par rapport aux autres professionnels. Ils doivent s’assurer de la provenance des fonds pour ne pas apporter leur concours à du blanchiment d’argent. Il est fortement conseillé aux avocats de faire signer un contrat au client, dans lequel il atteste que l’origine des bitcoins ne provient pas de sources illicites. Et en cas de doute, de refuser la transaction.
 
Pour finir, précisons que la facturation en bitcoin n’échappe pas à un traitement comptable (v. Touati A. et Cabassu. M., Le traitement des cryptomonnaies dans les bilans comptables, Actualités du droit, 8 févr. 2018) et le paiement de la TVA reste obligatoire (v. Polrot S., La problématique de la fiscalité du trading de cryptomonnaies n’est pas résolue, Actualités du droit, 23 juin 2017).
Source : Actualités du droit