Clap de fin pour l'affaire France Télécom
Public - Droit public des affaires
08/12/2016
Dans un arrêt du 30 novembre 2016, la Cour de justice rejette le pourvoi de la Commission dans l'affaire de l'avance d'actionnaire proposée à France Télécom par l'État français alors que l'entreprise connaissait une crise importante. La décision de la Commission, selon laquelle cette avance d'actionnaire constitue une aide d'État incompatible avec le marché intérieur, est définitivement annulée.
L’arrêt du 30 novembre 2016 de la Cour de justice constitue l’épilogue de la saga de l’affaire France Télécom qui a débuté en 2004 avec la décision de la Commission européenne déclarant le projet d’avance d’actionnaire proposé par l’État français à France Télécom constituait une aide d’État incompatible avec le droit de l’Union.
Bref rappel des faits : en 2002, France Télécom (depuis, Orange), dont l’État était encore actionnaire majoritaire, se trouvait dans une situation financière difficile avec une dette nette de près de 70 milliards d’euros. Le ministre de l’Économie a fait plusieurs déclarations publiques visant à assurer France Télécom du soutien des autorités françaises. Ces déclarations ont été suivies en décembre 2002 d’un projet d’avance d’actionnaire – offre qui n’a cependant été ni acceptée ni exécutée par France Télécom.
En 2004, la Commission a déclaré que cette avance, placée dans le contexte des déclarations faites depuis juillet 2002, constituait une aide d’État incompatible avec le droit de l’Union. Après un premier round entre le Tribunal et la Cour, le Tribunal a annulé une deuxième fois en juillet 2015 la décision de la Commission, motif pris de l'application erronnée du critère de l’investisseur privé avisé.
Dans son arrêt du 30 novembre 2016, la Cour juge que le Tribunal n’a pas excédé les limites du contrôle qu’il lui incombait d’exercer ni dénaturé la décision de la Commission. En effet, il a examiné l’appréciation de la Commission selon laquelle il convenait d’appliquer le critère de l’investisseur privé avisé au mois de juillet 2002 et non au mois de décembre 2002. À cet égard, il a jugé que cette appréciation était fondée sur une prise en compte sélective des éléments de preuve disponibles, ces éléments n’étant pas, par ailleurs, de nature à étayer les conclusions tirées par la Commission. Il a donc correctement jugé, selon la Cour, que l’appréciation de la Commission était entachée d’une erreur manifeste.
Quant à l’argument de la Commission selon lequel le critère de l’investisseur privé aurait dû être appliqué au mois de juillet 2002 et non au mois de décembre 2002, les juges luxembourgeois relèvent que, d’après les constatations du Tribunal, l’offre d’avance d’actionnaire n’a été faite qu’au mois de décembre 2002. En effet, les autorités françaises n’ont pris aucun engagement ferme au mois de juillet 2002 et la décision de soutenir financièrement France Télécom au moyen de l’offre d’avance d’actionnaire n’a été prise qu’au début du mois de décembre 2002 et non pas au courant du mois de juillet 2002. Dès lors, anticiper au mois de juillet 2002 le moment où le critère de l’investisseur privé avisé devait être apprécié aurait nécessairement conduit à exclure de cette appréciation des éléments pertinents intervenus entre le mois de juillet 2002 et le mois de décembre 2002.
Le recours de la Commission est donc rejeté ; la décision de la Commission du 2 août 2004 est définitivement annulée.
OBSERVATIONS. Pour aller plus loin sur cette affaire, v. RLC 2016/51, L'affaire France Télécom ou comment donner sa parole sans faire de promesse, E. Paroche et J.-S. Duprey.
Bref rappel des faits : en 2002, France Télécom (depuis, Orange), dont l’État était encore actionnaire majoritaire, se trouvait dans une situation financière difficile avec une dette nette de près de 70 milliards d’euros. Le ministre de l’Économie a fait plusieurs déclarations publiques visant à assurer France Télécom du soutien des autorités françaises. Ces déclarations ont été suivies en décembre 2002 d’un projet d’avance d’actionnaire – offre qui n’a cependant été ni acceptée ni exécutée par France Télécom.
En 2004, la Commission a déclaré que cette avance, placée dans le contexte des déclarations faites depuis juillet 2002, constituait une aide d’État incompatible avec le droit de l’Union. Après un premier round entre le Tribunal et la Cour, le Tribunal a annulé une deuxième fois en juillet 2015 la décision de la Commission, motif pris de l'application erronnée du critère de l’investisseur privé avisé.
Dans son arrêt du 30 novembre 2016, la Cour juge que le Tribunal n’a pas excédé les limites du contrôle qu’il lui incombait d’exercer ni dénaturé la décision de la Commission. En effet, il a examiné l’appréciation de la Commission selon laquelle il convenait d’appliquer le critère de l’investisseur privé avisé au mois de juillet 2002 et non au mois de décembre 2002. À cet égard, il a jugé que cette appréciation était fondée sur une prise en compte sélective des éléments de preuve disponibles, ces éléments n’étant pas, par ailleurs, de nature à étayer les conclusions tirées par la Commission. Il a donc correctement jugé, selon la Cour, que l’appréciation de la Commission était entachée d’une erreur manifeste.
Quant à l’argument de la Commission selon lequel le critère de l’investisseur privé aurait dû être appliqué au mois de juillet 2002 et non au mois de décembre 2002, les juges luxembourgeois relèvent que, d’après les constatations du Tribunal, l’offre d’avance d’actionnaire n’a été faite qu’au mois de décembre 2002. En effet, les autorités françaises n’ont pris aucun engagement ferme au mois de juillet 2002 et la décision de soutenir financièrement France Télécom au moyen de l’offre d’avance d’actionnaire n’a été prise qu’au début du mois de décembre 2002 et non pas au courant du mois de juillet 2002. Dès lors, anticiper au mois de juillet 2002 le moment où le critère de l’investisseur privé avisé devait être apprécié aurait nécessairement conduit à exclure de cette appréciation des éléments pertinents intervenus entre le mois de juillet 2002 et le mois de décembre 2002.
Le recours de la Commission est donc rejeté ; la décision de la Commission du 2 août 2004 est définitivement annulée.
OBSERVATIONS. Pour aller plus loin sur cette affaire, v. RLC 2016/51, L'affaire France Télécom ou comment donner sa parole sans faire de promesse, E. Paroche et J.-S. Duprey.
Source : Actualités du droit