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Connaissement direct : absence de responsabilité du transporteur maritime

Transport - Mer/voies navigables
08/06/2022
Si la responsabilité du transporteur maritime opérant sous connaissement direct peut être recherchée ès qualités de commissionnaire, encore faut-il qu'il ait fait acte de commission.  
Un cigarettier confie à une compagnie maritime l’expédition, des Pays-Bas en Jordanie, de quatre conteneurs de cartons de cigarettes. Lors du post acheminement terrestre en territoire jordanien, l’un des quatre conteneurs est dérobé.
 
Assigné en réparation par les intérêts marchandises, le transporteur se défend : primo, la subrogation des assureurs facultés ne serait pas avérée ; deuxio, le connaissement émis serait un connaissement direct et non de transport multimodal ; tertio, conséquence du deuxio, sa responsabilité en tant que commissionnaire pour la partie terminale du transport ne saurait être retenue, le transporteur routier ayant directement été requis par le destinataire.
 
La cour de se prononcer alors sur ces divers arguments.
 

Sur la subrogation des assureurs

 
Les assureurs fondent leur action sur la subrogation conventionnelle telle qu’envisagée, alors, par l’article 1250 du Code civil, se prévalant d’un acte de subrogation et d’un paiement intervenus le même jour au bénéfice du cessionnaire des droits du destinataire. La cour d’avaliser alors, au vu de ces éléments, la subrogation, rappelant là qu’ « il est de principe que la condition de concomitance posée par cet article est remplie lorsque le subrogeant a manifesté expressément, même dans un document antérieur, sa volonté de subrogation à l'instant du paiement ; cette règle jurisprudentielle a été au demeurant consacrée par l'article 1346-1 du Code civil issu de l'ordonnance du 10 février 2016. » (voir sur ce point notre récent commentaire de CA Aix-en-Provence, 19 mai 2022, no 21/07480, Asco NV et a. c/ CMA-CGM), ajoutant que « l'argument tiré par la société [le transporteur] de l'absence de production de la police d'assurance est dans ce cadre inopérant, ne s'appliquant que lorsque la subrogation légale est invoquée ».  
 

Sur la nature du connaissement

 
La question se posait de savoir si le connaissement émis était un connaissement direct ou un connaissement combiné (ou multimodal). Là le juge d’appel confirme l’analyse du juge du premier degré ayant retenu la qualification de connaissement direct. En effet, si le document indiquait, outre les ports d’embarquement et de débarquement, une destination finale terrestre, nulle mention n’était faite du lieu de prise en charge initial, ce alors même qu’était attirée l'attention des rédacteurs du connaissement sur la nécessité de porter cette mention uniquement si le document était utilisé comme connaissement de transport combiné, ou multimodal.
 

Sur la responsabilité de la compagnie maritime

 
Le connaissement étant direct, la compagnie pouvait voir sa responsabilité engagée en qualité de commissionnaire pour ce vol survenu au cours de l’acheminement routier final. Or le transporteur routier avait été requis par la société ayant opéré le dédouanement de la marchandise, elle-même directement mandatée par le destinataire. Et si le transporteur maritime était informé de ce choix et l’avait avalisé via son agent maritime, il ne pouvait en assumer la responsabilité.
 
In fine, la cour de confirmer la décision de première instance ayant débouté les requérants.
Source : Actualités du droit