Loi « Climat et résilience » : focus sur le dispositif pénal

Environnement & qualité - Environnement
16/09/2021
La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, consacre son titre VII au renforcement de la protection judiciaire de l’environnement. Infractions et sanctions nouvelles, écocide, moyens techniques : quels sont les principales avancées du texte ?

Exposition à un risque immédiat d’atteinte grave et durable

 Avant de s'intéresser au détail des dispositions nouvelles, il importe de noter que fait notamment son entrée au sein de ce titre VII de la loi, la notion d’effets ou d’atteintes « durables », précisément définis comme étant « susceptibles de durer au moins sept ans ».
 
Aux termes de l’article 279 de la loi « Climat et résilience », l’exposition directe de la faune, de la flore ou de la qualité des eaux à un risque immédiat d’atteinte grave et durable est punie de trois ans d'emprisonnement et de 250 000 € d'amende, (ce montant pouvant être porté jusqu'au triple de l'avantage tiré de la commission de l'infraction) dans les hypothèses suivantes :
 
  • les faits prévus aux articles L. 173-1 et L. 173-2 du code de l’environnement, à savoir le fait d’agir sans l’autorisation, l’enregistrement, l’agrément, l’homologation ou la certification requis ou de ne pas avoir respecter la mise en demeure conséquente à un tel comportement ;
  • le non-respect de la législation applicable au transport ferroviaire, routière ou fluviale des marchandises dangereuses (règles relatives aux autorisations, visites et épreuves du matériel de transport, circulation ou stationnement sur des voies interdites, document de transport et emballages, à la signalisation).

 Atteintes générales aux milieux physiques 

 Le livre II du code de l’environnement relatif aux milieux physiques est complété par un Titre III consacré aux « atteintes générales aux milieux physiques »
Le nouvel article L. 231-1 du code de l’environnement punit de cinq ans d’emprisonnement et d’un million d’euros d’amende, (ce montant pouvant être porté jusqu'au quintuple de l'avantage tiré de la commission de l'infraction), « Le fait, en violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, d'émettre dans l'air, de jeter, de déverser ou de laisser s'écouler dans les eaux superficielles ou souterraines ou dans les eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales, directement ou indirectement, une ou plusieurs substances dont l'action ou les réactions entraînent des effets nuisibles graves et durables sur la santé, la flore, la faune, à l'exception des dommages mentionnés aux articles L. 218-73 [pollution aquatique ayant un impact sur la faune et la flore aquatique…] et L. 432-2 […ou la faune piscicole], ou des modifications graves du régime normal d'alimentation en eau ».
Font exception à la règle les dépassements des valeurs limites d'émission dans l'air fixées par décision de l'autorité administrative compétente et les opérations de rejet et l'utilisation de substances autorisées dans le respect des prescriptions administratives.

L’article L. 231-2 du code de l’environnement, s’attaque, pour sa part, aux infractions en matière de déchets, qui lorsqu’elles provoquent une dégradation substantielle de la faune et de la flore ou de la qualité de l'air, du sol ou de l'eau sont punies de trois ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende.

Ecocide

Constituent un écocide :
  • les infractions définies à l’article L. 231-1 précédemment énumérées, commises de manière intentionnelle ;
  • les infractions prévues à l'article L. 231-2, commises de façon intentionnelle, lorsqu'elles entraînent des atteintes graves et durables à la santé, à la flore, à la faune ou à la qualité de l'air, du sol ou de l'eau.
Les peines sont alors les suivantes :
  • la peine d'emprisonnement est portée à dix ans ;
  • la peine d’amende est portée à 4,5 millions d'euros, ce montant pouvant aller jusqu'au décuple de l'avantage tiré de la commission de l'infraction.
 

Restauration du milieu

Aux termes de l’article L. 231-4 du code de l’environnement, pour les infractions décrites ci-dessus prévues aux articles L. 173-3 et L. 231-1 à L. 231-3 précités, en plus les peines d’amende et d’emprisonnement le tribunal peut également imposer au condamné de procéder à la restauration du milieu naturel dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 173-9 dudit code.

Recherche et constat des infractions

Les commissionnements délivrés aux inspecteurs de l'environnement dans le cadre de la police de l’eau valent désormais pour rechercher et constater les infractions prévues aux articles L. 231-1 à L. 231-3 du code de l'environnement.
Classiquement, aux termes de l’article L. 231-5 du code de l’environnement, outre les officiers et agents de police judiciaire et les inspecteurs de l'environnement mentionnés à l'article L. 172-1, sont habilités à rechercher et à constater ces infractions les agents des douanes, inspecteurs de la sûreté nucléaire, agents de l'Office national des forêts, agents des réserves naturelles, agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ingénieurs et techniciens du laboratoire central et les inspecteurs de salubrité de la préfecture de police et gardes champêtres.
Avec quels moyens ces agents pourront-ils opérer ? Un nouvel article L. 171-5-2 du code de l’environnement autorise et encadre très précisément le recours à des « caméras et capteurs installés sur des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote, à la captation, à l'enregistrement et à la transmission d'images ainsi que de données physiques ou chimiques » (ce dispositif est aussi régi par un nouvel article L. 941-9 du code rural et de la pêche maritime).

Réévaluation des peines

Au-delà de ces nouvelles infractions et sanctions et de ces moyens d’investigation, la loi « climat et résilience », a permis une réévaluation significative des peines dans le cadre de dispositions pénales visant à protéger pour l’essentiel, les milieux physiques (C. env., livre II), les espaces naturels (C. env., livre III) et le patrimoine naturel (C. env., livre IV).
 

BEA – risques industriels

Enfin, ce titre VII de la loi « climat et résilience » offre un cadre légal au bureau d'enquêtes et d'analyses sur les risques industriels (BEA –risques industriels), créé à la suite de l’accident de Lubrizol survenu en septembre 2019, et qui jusqu’alors devait se contentait d’un cadre réglementaire pour organiser ses missions. Les articles L. 501-1 et suivants feront l’objet d’une prochaine Actualité.



 
Source : Actualités du droit