La semaine du droit commercial
Affaires - Commercial
06/04/2021
Présentation des dispositifs des arrêts publiés au Bulletin civil de la Cour de cassation, en droit commercial, la semaine du 29 mars 2021.
« Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 décembre 2018), la société MHCS, qui fabrique et commercialise des champagnes, a conclu avec Mme Z, épouse X, un contrat prenant effet au 1er octobre 1990, qualifié, par la première, de mandat pour la vente de ses champagnes, en vertu duquel Mme X jouait le rôle d'intermédiaire entre le mandant et la clientèle, s'agissant de la transmission des commandes, et, par la seconde, de contrat d'agence commerciale.
Le 15 décembre 2014, la société MHCS, reprochant des fautes graves à Mme X, a résilié ce contrat.
Mme X a assigné la société MHCS devant le tribunal de commerce de Marseille en paiement de commissions sur le fondement des articles 1134 et 1147 du Code civil, d'une indemnité de préavis et de clientèle sur le fondement des articles L. 134-1 à L. 134-17 du Code de commerce et, subsidiairement, si le contrat n'était pas qualifié d'agence commerciale, en paiement d'une indemnité pour rupture brutale de la relation commerciale établie sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° de ce Code.
Par un jugement du 18 février 2016, le tribunal de commerce de Marseille, après avoir retenu la qualification de contrat d'agence commerciale, a condamné la société MHCS au paiement, notamment, d'indemnités compensatrices de clientèle et de préavis.
La société MHCS a relevé appel à la fois devant les cours d'appel d'Aix-en-Provence et de Paris, demandant à la première de constater que la seconde était régulièrement saisie de l'appel du jugement précité, de se déclarer dépourvue du pouvoir juridictionnel de statuer sur le litige et de se dessaisir, en conséquence, de l'entier dossier au profit de la cour d'appel de Paris.
Vu les articles L. 442-6 et D. 442-3 du Code de commerce :
Selon le second de ces textes, la cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par les juridictions spécialement désignées dans les litiges relatifs à l'application du premier, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019. L'inobservation de cette règle est sanctionnée par une fin de non-recevoir.
Pour déclarer recevable l'appel formé contre le jugement rendu par le tribunal de commerce de Marseille, saisi à titre subsidiaire, d'une demande sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce, l'arrêt retient que la recevabilité de l'appel n'aurait pu être examinée qu'une fois tranchée la nature du contrat liant la société MHCS à Mme X.
En statuant ainsi, alors que la cour d'appel de Paris dispose exclusivement du pouvoir juridictionnel de statuer sur les décisions rendues par les juridictions spécialement désignées pour statuer sur l'article L. 442-6 du Code de commerce, ce texte fût-il invoqué devant elle à titre subsidiaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».
Cass. com, 31 mars 2021, n° 19-14.094, P *
Rupture brutale de relation commerciale établie – actes de commerce
« Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 septembre 2018), la Selarl Sourire et santé, cabinet de chirurgiens-dentistes, s'est fournie pendant plusieurs années auprès de la Sarl Laboratoire BC (le laboratoire) en matériel dentaire et, notamment, en prothèses dentaires.
Le 10 juillet 2014, elle a informé son fournisseur de la cessation immédiate de toute collaboration.
Lui reprochant d'avoir rompu brutalement la relation commerciale établie qu'elles entretenaient depuis plusieurs années, le laboratoire a assigné la Selarl Sourire et santé en paiement de dommages-intérêts, sur le fondement de l'article L. 442-6, 1, 5° du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, et, subsidiairement, sur celui de l'article 1382, devenu 1240, du Code civil.
Vu l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, et l'article R. 4127-215 du Code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2020-1658 du 22 décembre 2020 :
Aux termes du premier de ces textes, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.
Selon le second, la profession dentaire ne doit pas être pratiquée comme un commerce.
Pour retenir la responsabilité de la Selarl Sourire et santé, l'arrêt retient qu'entre dans le champ d'application de l'article L. 442-6, I, 5° du code de Commerce toute relation commerciale qui porte sur la fourniture d'un produit ou d'une prestation de service et qu'en l'espèce, le laboratoire, qui fabrique du matériel dentaire, vendait ses produits au cabinet de chirurgiensdentistes, lequel les refacturait dans l'exécution de ses prestations, dégageant une marge brute sur ces produits, de sorte que ces deux sociétés, commerciales par la forme, effectuaient des actes de commerce.
En statuant ainsi, alors que l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce n'a pas vocation à s'appliquer dès lors qu'il n'existe pas de relation commerciale entre un chirurgien-dentiste et son fournisseur de matériel dentaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».
Cass. com., 31 mars 2021, n° 19-16.139 P *
*Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 6 mai 2021
Source : Actualités du droit