Perte du statut de réfugié : aucune violation des droits de la défense si l’audience judiciaire est à huis clos

Public - Droit public général
24/02/2021
Les dispositions législatives en vertu desquelles un magistrat de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) décide de tenir une audience hors la présence du public, ne sont pas contraires aux droits et libertés garantis par la Constitution.
Par décision du 23 juin 2016, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin au statut de réfugié d’un ressortissant palestinien. La CNDA a confirmé cette décision suivant jugement du 10 juin 2019. Dans le cadre de son pourvoi visant à faire annuler la décision de l’OFPRA, le requérant demande un renvoi devant le Conseil constitutionnel pour examiner la conformité de l’article L. 733-1-1 du CESEDA d’une part et d’autre part, des articles L. 713-5 et L. 713-6 du CESEDA.
 
Le requérant fait grief à la présidente de la 4ème section de la 1ère chambre de la Cour nationale du droit d'asile de s’être appuyée sur les dispositions de l’article L. 733-1-1 du CESEDA, pour décider de tenir son audience à huis clos. Cet article prévoit en effet une possibilité d’audience hors la présence du public « si les circonstances de l’affaire l’exigent ». Le Conseil d’État précise que c’est la nature des litiges et les enjeux particuliers qu’ils présentent qui vont déterminer la CNDA à décider ou non d’un huis clos. La juridiction du droit d’asile tient compte de l'intimité et de la vie privée des personnes, de la sécurité et de la confidentialité et va prononcer un huis clos dans les seuls cas où la sauvegarde de l'ordre public, le respect de l'intimité des personnes ou des secrets protégés par la loi l'exigent.
 
Le grief relatif à une atteinte au principe de publicité des audiences devant les juridictions administratives est donc rejeté par le Conseil d’État.

Aux termes de l’article L. 713-5 du CESEDA, « l'autorité judiciaire communique au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et au président de la Cour nationale du droit d'asile, sur demande ou d'office, tout élément recueilli au cours d'une instance civile ou d'une information criminelle ou correctionnelle, y compris lorsque celle-ci s'est terminée par un non-lieu, de nature à faire suspecter qu'une personne qui demande l'asile ou le statut d'apatride ou qui s'est vu reconnaître le statut de réfugié, le bénéfice de la protection subsidiaire ou le statut d'apatride relève de l'une des clauses d'exclusion mentionnées aux articles L. 711-3 et L. 712-2 du présent code ou à l'article 1er de la convention de New York, du 28 septembre 1954, relative au statut des apatrides ou d'un refus ou d'une fin de protection en application de l'article L. 711-6 du présent code ».
 
Le Conseil d’État rappelle que dans le cadre de son pouvoir d’instruction, la CNDA va rechercher l’ensemble des éléments d’information pertinents qui vont la conduire à rendre sa décision. Et à ce titre, l’article L. 713-5 du CESEDA permet à la cour de solliciter l’autorité judiciaire qui doit « communiquer tous les éléments utiles et non les seuls éléments susceptibles de justifier l'application d'une clause d'exclusion ou une décision de refus ou de fin de protection, le cas échéant en complétant une première communication, de sa propre initiative, par tous éléments nouveaux de nature à éclairer utilement la Cour ».
 
Le Conseil d’État considère donc que le requérant n’est pas fondé à dire que les articles litigieux violent les droits de la défense, l'égalité devant la justice ou le droit à un procès équitable garantis par les articles 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
 
La Haute juridiction administrative a rapidement écarté l’article L. 713-6 du CESEDA car ses dispositions ne sont pas applicables au litige, elles portent sur les cas de suspicion du caractère frauduleux d'une demande d'asile. Il n’y a donc pas lieu de renvoyer devant le Conseil constitutionnel.
 
Source : Actualités du droit